N’a-t-on
pas un jour désiré tracer avec la précision de l’araignée brodant sa toile les
contours vaporeux de l’âme ? Sans avoir à m’éloigner du monde, sans
chercher non plus à capturer la beauté muette de ces secondes, j’ai vu, avec
les yeux ou avec le cœur, je ne saurais le dire, mais j’ai vu la flamme de ta
vie, l’essence de ton être, cette lumière invisible qui brille en chaque homme
et dans laquelle se reflète ce que les sens se refusent à connaître. J’ai
aperçu cette lueur diluée qui s’échappait de ton corps et caressait ta
silhouette enveloppée dans la seule lumière d’un rayon de lune encore timide. J’ai vu ce
que peu d’autres ont vu, connu ce que personne n’a connu. Ton âme
insaisissable, cette beauté perlée qui teignait tes gestes d’une lointaine
immortalité, cette écume légère et parfumée qui avait l’odeur de ton sourire et
le goût de mon amour t’a enveloppée, caressant ta peau, se rendant visible à
travers l’invisible, pour le seul plaisir de mes yeux.
Je
te voyais rayonner comme l’astre céleste, nourrissant mes rêves et figeant mes
envies. Mais toi, ni lune ni étoile, brillante comme elles mais maquillée d’une
douceur fantomatique et instable, toi, tu n’étais que nuages, brume et espoirs
indistinct. Toi, tu étais un coucher de soleil patiné d’ombres roses,
merveilleux, éphémère et incertain. Toi, tu étais le bruit des vagues rasant le
sable, violente et pourtant si douce, fraîche, irrégulière. Toi, tu étais
toutes ces formes qu’on a tenté de donner à l’amour, les rimes, les poèmes
lancés du bout de la plume, les déclarations, les flammes, les envies et le
désir dépeint fraîchement dans l’ombre des souvenirs. Tu étais tout cela, et
bien plus, l’indicible malaise des sentiments, l’incompréhension, les
sensations déchaînées et cette vague impression de vérité.
Et
à cet instant-là, pendant ces courtes secondes où tu n’as semblé être qu’à moi,
j’ai cru pouvoir, à travers la vague clarté qui émanait de ton corps, saisir
l’insaisissable et figer l’étrange mouvance de tes sens. J’ai cru appartenir
avec toi au secret de cet instant, j’ai cru saisir ta main et pouvoir la
garder, j’ai cru que plus jamais dans l’éphémère brouillard des jours tu ne
t’envolerais.